Carnets d'architectes n°26 : Jean Balladur
Jean Balladur (1924-2002) serait-il l’architecte d’une seule oeuvre, La Grande Motte dont il fut le concepteur pendant trente ans ? La polémique violente qui entoure la réalisation de cette station où il inventa le balnéaire pour tous, l’accuse d’élever un grand ensemble de béton défigurant le littoral languedocien. Hâtivement rebaptisée « Sarcelle-sur-mer » par la critique, mais plébiscitée par le public, La Grande Motte assure la postérité de Balladur, mais le condamne au nom d’un affligeant procès en formalisme, et occulte encore aujourd’hui une oeuvre riche et complexe.
Héritier du Mouvement moderne, minimaliste pendant une décennie au cours de laquelle il conçoit des oeuvres d’une pureté de ligne qui le font accepter par ses pairs modernistes, Balladur est exclu du Comité de rédaction de L’Architecture d’Aujourd’hui en 1971 alors que sortent du sable les premières pyramides de la Grande Motte jugées incompatibles avec la ligne de la revue. Balladur revendique une pensée libre et non dogmatique. Fidèle à une philosophie où l’existence préexiste au sens, héritée de l’existentialisme de Sartre dont il fut l’élève, Balladur est un intellectuel dont la démarche consiste à informer une pensée réfléchie et indépendante. Bien qu’il récuse l’étiquette de post-moderniste, son oeuvre construite, d’une grande richesse d’invention formelle, l’inscrit parmi les précurseurs de la condition post-moderne définie par Jean-François Lyotard en 1979, celle du refus de tout métarécit et des théories messianiques.
« Si j’étais Dieu, je me méfierais des architectes ! Ils sont les instruments subversifs du projet secret de l’espèce humaine : reconstruire le Paradis Perdu. » Jean Balladur, OEuvre, p.15.
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Dossier thématique : Architecture